En attendant l'ouverture de la salle du Grand Théatre où est programmée Islaja, je rencontre le chanteur d'Une, Gerrit van der Scheer, venu assister lui aussi au concert de la finlandaise. Il m'apprend que, contrairement à ce que j'avais écrit sur ces pages, l'album n'est pas encore en cours d'enregistrement, mais seulement en préparation. Le groupe en est actuellement au stade de se constituer un répertoire dans lequel il choisira les meilleurs morceaux le moment venu. On suivra ça de près.
La première chose que fait Merja Kokkonen (Islaja) en arrivant sur scène, c'est de retirer ses bottes. Puis elle s'avance vers le micro et commence à chanter a capella. C'est la première fois que j'entends chanter en finnois lors d'un concert (lorsque j'étais allé en Finlande, tous les artistes que j'avais vu s'exprimaient en anglais) et je m'aperçois que j'en suis très troublé, que cette langue qui a accompagné quelques unes de mes plus belles émotions musicales (Se., Ismo Alanko, Tuomari Nurmio, Karkiautomaatti) déclenche en moi des choses auxquelles je ne m'étais pas préparé. Merja Kokkonen manipule un petit boitier qui lui permet de re-diffuser sa voix en boucles et de construire sa chanson en couches superposées. C'est magnifique. Je suis encore sous le choc de ce premier morceau, lorsque le reste du groupe apparaît. Car Islaja, c'est maintenant un groupe de facture on ne peut plus classique: guitare, orgue, basse, batterie, et - quand même - un préposé aux bruitages en tous genres. Ce qui m'avait séduit sur le morceaux d'Islaja découverts sur le net, c'est leur amateurisme éclairé, leur côté "work in progress", l'impression - erronée sans doute - que la musique se créait devant nous au moment même où on l'écoutait. Malheureusement, avec ce groupe classiquement rock (et sa basse très en avant qui recouvre tout le reste), il n'en reste plus rien. Emprisonnée dans des carcans trop rigides, la musique d'Islaja reste désespérément clouée au sol, incapable de susciter le moindre frisson ni la moindre émotion. Les titres défilent et se ressemblent sans provoquer autre chose qu'un ennui poli. Finalement, lorsqu'au terme d'un interminable morceau répétitif, la finlandaise envoie valser ses grelots et autres clochettes de l'autre coté de la scène et récupère ses bottes avant de quitter les lieux, c'est plus du soulagement qu'autre chose qu'on ressent. D'autres ont été moins patients que moi et sont partis avant la fin.
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(Islaja @ Grand Théatre Up, 11.01.07, photo: rockomondo) Me voilà bien ! Que faire si tous les artistes que j'attendais avec le plus d'impatience me jouent ces sales tours ? Peut-être aller jeter un oeil à la Muziekschool, dont je garde un très bon souvenir après y avoir vu pour la première fois les danois d'Under Byen il y a quatre ans. Et justement, ce sont d'autres danois qui vont s'y produire à présent avec Oh No Ono. J'avais entraperçu ce groupe au dernier festival Spot et, même de loin, ça m'avait paru très bien. C'est l'occasion de vérifier si je me suis trompé ou non. Mais avant même qu'ils aient produit la moindre note, on ne peut s'empècher de sourire lorsque les trois musiciens principaux arrivent sur scène, rigoureusement identiques et arborant la même abondante chevelure bouclée. On dirait que le premier s'est fait cloner pour donner les deux autres. Dés que la musique commence, on sait que cette fois-ci on a - enfin ! - tiré le bon numéro. Le premier album d'Oh No Ono, "Yes", avait déjà permis d'apprécier le cocktail inédit concocté par ces joyeux allumés: un euphorisant mélange de Scissor Sisters, de C.S.S. et de Junior Senior, le tout relevé par une bonne dose de Spike Jones. Car il y a indéniablement un coté cartoonesque à la Musique d'Oh No Ono, ne serait-ce que dans les voix incroyablement haut perchées des chanteurs, et la vitesse absurde à laquelle ils expédient leurs morceaux. Sur scène, l'effet festif est encore décuplé. Tout fonctionne au quart de poil, y compris cette reprise pour le moins inattendue de "Subterrean Homesick Blues" ("This is a song from the sixties" annonce le chanteur), assaisonnée à la sauce Oh No, et qui fait s'élargir encore - si c'était possible - les bananes sur le visage des spectateurs. Le groupe enchainera ainsi la quasi-totalité de son album et de l'EP qui avait précédé, terminant sur une autre reprise, une version tellurique de "Tomorrow never knows", particulièrement bien adaptée aux débordements de fin de concert. De quoi justifier la première véritable ovation du festival. Il ne serait pas étonnant qu'après une pareille prestation, on retrouve Oh No Ono dans plus d'un festival cet été. C'est tout le mal qu'on leur - et qu'on nous - souhaite.
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(Oh No Ono @ Muziekschool, 11.01.07, photo: rockomondo) (Passes magnétiques au dessus du theremin pendant "Tomorrow never knows")
ISLAJA : "Sateen Tullessa" (extrait de "Palaa aurinkoon", 2005)
OH NO ONO : "Keeping warm in cold country" (vidéo)
On peut écouter d'autres morceaux d'Oh No Ono sur leur page MySpace.
Et télécharger d'autres titres d'Islaja sur la page que lui a consacré sa maison de disques Fonal.