La veille du concert de Powersolo, Spot 12 avait pourtant démarré de bien décevante manière. Mais quelle idée était donc passée par la tête des organisateurs pour inviter au concert d'ouverture du festival les laborieux Lis Er Stille ? Morceaux de dix minutes à mi-chemin entre post et prog-rock, navrante absence d'inspiration tant pour les mélodies que pour les arrangements, même progression crescendo prévisible sur chaque titre: on se serait ennuyé ferme si le bassiste ne nous avait pas diverti en nous offrant un florilège de poses rock n'rolliennes comme on n'en trouve généralement que chez les métalleux. C'est d'ailleurs à ça que fait penser Lis Er Stille: un groupe métal s'essayant sans succès au post-rock. A oublier très vite.
La nuit se poursuivait par le plateau "Un-Pop Classik", un projet européen créé à l'instigation du Festival International de Benicassim. Le principe ? Quatre groupes (The Sunday Drivers, Venus, Teitur, Dionysos) originaires de quatre pays différents (Espagne, Belgique, Danemark, France) se produisent en plateau dans un festival de chacun de ces pays (Benicassim, Les Nuits Botaniques, Spot, Les Eurockéennes) accompagnés par un orchestre classique originaire du pays invitant. A Spot, c'est l'ensemble Midvest, habitué de ce genre d'exercice, qui s'y collait. Malheureusement, Dionysos avait décliné l'invitation danoise, et c'est à Teitur que revenait l'honneur d'ouvrir la soirée. Originaire des Iles Feroë, Teitur décline un songwriting inspiré en attachantes pièces mélancoliques qui flattent l'oreille plus qu'elles ne provoquent de grandes émotions. Sa musique s'accorde à merveille aux cordes de l'ensemble Midvest, mais on reste néanmoins sur sa faim, cherchant en vain un peu d'âme au milieu de toute cette joliesse.
(Venus @ Spot 12, 1er juin 2006)
Avec Venus, c'est une toute autre histoire. On sait que le groupe bruxellois s'est déjà frotté à l'expérience de l'orchestre classique ("The man who was already dead"), mais avec l'excellent "The red room", ils viennent justement de nous sortir leur disque le plus sobre, le plus dépouillé, le plus électrique aussi. Comment conjuguer cette nouvelle donne avec l'exercice imposé sans donner pour autant l'impression d'un retour en arrière ? Venus aborde le challenge de manière frontale, ré-arrange le baroque "Beautiful Days" - ici joué par le groupe seul - à la façon "près de l'os" du nouvel album, et offre aux titres décharnés de "The Red Room" un traitement de cordes et de cuivres bien plus rythmique que mélodique. C'est le tout premier concert de Venus au Danemark. En point de mire, Marc Huygens, visage taillé à la serpe, vétu d'une étrange jupe longue, semble un peu tendu façe à une audience clairsemée (il y avait trois fois plus de monde pour Teitur). Mais au fur et à mesure que progresse le concert, la sincérité et la détermination du groupe finissent par l'emporter. Le mariage avec l'ensemble Midvest, plus ou moins réussi suivant les morceaux, débouche finalement sur quelques beaux décollages. Et le dernier titre est tout simplement renversant, laissant l'assistance sans voix avant qu'elle n'accorde au groupe un joli triomphe. Gagné, une fois de plus.
J'avais le secret espoir que l'autre affiche de la soirée, qui réunissait deux groupes canadiens et les danois Figurines, aurait laissé la place d'honneur à ces derniers. La prestation qu'ils avaient donné l'année dernière au même endroit reste en effet l'un de mes meilleurs souvenirs de Spot 11. Malheureusement Figurines passe en deuxième position, et lorsque je sors du concert de Venus, leur set est déjà presque terminé. Juste le temps d'apercevoir que le chanteur arbore toujours ses légendaires rouflaquettes, et de constater que le groupe n'a rien perdu de son irrésistible énergie, et hop! les voilà partis. Gros succès, mais on ré-entendra certainement parler des Figurines qui marchent de mieux en mieux aux Etats-Unis et qui pourraient bien bénéficier à partir de là d'un effet ricochet. Ce qui ne serait que justice: ils le méritent vraiment.
(Figurines @ Spot 12, photo: Jonas Jacobsen / MyMusic.dk) Retour à Un-Pop Classik, et à un juger par la débauche de pilosités brunes qui a envahi la scène, le groupe qui se trouve là n'a rien de scandinave. Effectivement, il s'agit des espagnols Sunday Drivers. J'avais trouvé leur album "Little Heart Attacks" agréable sans être renversant, mais là, l'épreuve de la scène est impitoyable. Beaucoup de frime et pas grand chose derrière. Le chanteur en fait des tonnes, l'organiste prend des poses, et il ne se passe strictement rien. Je leur accorde un second morceau, par acquis de conscience, et décide d'aller voir ailleurs.
Pourquoi pas au Musikcafeen où un collectif de labels danois (Sunbeat, Book King et Glorious) propose ses groupes en showcase ? Mon idée était d'y voir jouer Cartridge, nouvelle signature du label Glorious à la réputation flatteuse. Pas de chance, je tombe sur un quintet d'excités en casquettes et T-Shirts Motorhead (Gob Squad ? Magnum 44 ?) ramonant un gros rock sans nuance. Je n'ai rien contre une bonne bourrinade de temps en temps, mais ceux-là sont vraiment trop mauvais. Après quatre ou cinq morceaux sur le même registre, je lâche prise. Les 1200 Km de route qui ont précédé commencent à se faire sérieusement sentir. Un bon dodo, et ça ira mieux demain.
Ecoutez quelques nouveaux titres de Teitur.
Ecoutez le nouvel album de Venus.
FIGURINES : "The wonder" (extrait de "Skeleton")
FIGURINES : "Rivalry" (extrait de "Skeleton")
FIGURINES : "Bright" (extrait de "Shake a mountain")
FIGURINES : "Debate because it's over" (extrait de "Shake a mountain")
Ecoutez la musique et visionnez les vidéos de The Sunday drivers.